Dans l’une des plus importantes annonces de désinvestissement à ce jour, des dizaines d’institutions religieuses font preuve de leadership en matière de climat et accélèrent la transition vers un avenir sans énergies fossiles.

18 novembre 2025 : Aujourd’hui, 62 institutions religieuses ont annoncé leur désinvestissement des entreprises du secteur des énergies fossiles, envoyant ainsi un signal fort aux négociateurs du sommet des Nations unies sur le climat au Brésil quant à l’urgence de supprimer progressivement les énergies fossiles, compte tenu des effets néfastes de leur extraction, de leur transport et de leur combustion sur le climat, la biodiversité et les droits humains.

La liste actuelle des institutions qui désinvestissent comprend cinq diocèses catholiques (quatre en Italie et un au Canada), des ordres religieux catholiques en France, en Belgique, en Allemagne, en Autriche, en Suisse, aux Pays-Bas, au Royaume-Uni et aux États-Unis, des banques catholiques et protestantes en Allemagne et 42 membres de l’Arbeitskreis Kirchlicher Investoren (AKI), un réseau d’investisseurs institutionnels de l’Église protestante allemande. La liste complète des institutions ayant procédé à des désinvestissements est disponible ici.

En France et en Belgique, la Province d’Europe occidentale francophone des jésuites a notamment rejoint l’annonce globale de désinvestissement. « Nous avons renoncé à investir dans les énergies fossiles, car il est essentiel de protéger notre maison commune. Le soin pour notre maison commune, pour notre planète est la quatrième préférence apostolique universelle de la Compagnie de Jésus. Une priorité portée par tous les jésuites et leurs collaborateurs » a déclaré Franck Delorme (sj), l’économe de la province.

Les franciscains de France et de Belgique (Ordre des Frères Mineurs) font également partie de la liste des institutions qui s’engagent vers le désinvestissement des énergies fossiles. C’est aussi le cas du collectif Lutte et Contemplation : « Lutte et Contemplation a pour raison d’être l’action pour la justice écologique et sociale. Nous recherchons une cohérence en plaçant nos quelques ressources financières dans une banque éthique, qui ne finance pas les énergies fossiles. Nous avons à cœur de nous inscrire dans cette démarche de désinvestissement et avons interpellé plusieurs diocèses ou congrégations pour y participer également ! » a déclaré Joseph Groccia, membre de l’équipe de coordination de Lutte et Contemplation.

Pour la première fois, un diocèse catholique au Canada a annoncé son désinvestissement des entreprises du secteur des énergies fossiles. Cette décision est particulièrement significative dans la mesure où le Canada, avec les États-Unis, l’Australie et la Norvège, figure parmi les pays les plus responsables de l’expansion des énergies fossiles depuis l’Accord de Paris. Ensemble, ces quatre pays ont augmenté leur production de combustibles fossiles de près de 40 % entre 2015 et 2024, tandis que la production du reste du monde a diminué de 2 % au cours de la même période.

En Italie, qui a été frappée par des chaleurs extrêmes, des incendies et des inondations ces derniers mois, les appels au désinvestissement lancés par de nombreux évêques catholiques et par la Communauté du diaconat sont particulièrement significatifs. Ils témoignent clairement du soutien massif dont bénéficie la sortie des énergies fossiles au sein de l’Église catholique italienne.

Avec le soutien de Christians for Future, les institutions religieuses allemandes occupent une place importante dans cette annonce, notamment 42 membres de l’Arbeitskreis Kirchlicher Investoren (AKI), parmi lesquels l’Église protestante d’Allemagne et les deux banques coopératives religieuses, l’Evangelische Bank et la Bank für Kirche und Diakonie, qui annoncent qu’elles basent leurs investissements sur leurs directives communes avec des critères d’exclusion pour le charbon et le pétrole et le gaz non conventionnels. Au sein de l’Église catholique, la province jésuite d’Europe centrale (qui couvre l’Allemagne, l’Autriche, la Suisse, la Lituanie et la Lettonie), Pax-Bank für Kirche und Caritas et la Steyler Bank annoncent aujourd’hui leur désinvestissement total des entreprises du secteur des énergies fossiles.

Lors de son discours prononcé le mois dernier à la conférence Susciter l’espérance, le pape Léon XIV a renouvelé son appel en faveur d’une action climatique courageuse et coordonnée, exhortant les institutions et les citoyens à assumer leurs responsabilités pour façonner un avenir juste. « Tous les membres de la société, par l’intermédiaire d’organisations non gouvernementales et de groupes de défense, doivent faire pression sur les gouvernements pour que ceux-ci élaborent et mettent en œuvre des réglementations, des procédures et des contrôles plus rigoureux. » 

Ses propos font écho à l’appel pressant lancé par les dirigeants religieux des pays du Sud. En juillet, les évêques catholiques d’Afrique, d’Asie, d’Amérique latine et des Caraïbes ont publié un appel commun avant la COP 30, exhortant à mettre fin à l’utilisation des combustibles fossiles et à prendre des mesures transformatrices fondées sur la dignité, la solidarité et la justice. « L’abandon des combustibles fossiles est non seulement nécessaire pour réduire les émissions, mais aussi pour réparer une dette écologique et morale envers les pays du Sud », ont-ils déclaré. Le Conseil œcuménique des Églises a décrit la COP 30 comme un « moment kairos », un moment décisif, qui doit mettre au centre les voix des peuples autochtones, des jeunes et des communautés en première ligne.

À l’échelle mondiale, plus de 1 700 institutions, représentant un actif total de plus de 40 000 milliards de dollars, se sont engagées à désinvestir des énergies fossiles sous une forme ou une autre. Les groupes confessionnels ont montré la voie, avec plus de 600 institutions religieuses à travers le monde qui ont pris des engagements en matière de désinvestissement.

Les institutions religieuses gèrent au total 3 000 milliards de dollars d’investissements à l’échelle mondiale. Outre le désinvestissement des énergies fossiles, les communautés religieuses appellent les gouvernements et les banques à supprimer progressivement leur soutien aux énergies fossiles et à accroître leurs investissements dans les énergies propres. Plus de 600 institutions religieuses ont soutenu les appels en faveur d’un traité de non-prolifération des énergies fossiles.

Les institutions religieuses qui mettent fin à leurs investissements dans les énergies fossiles envoient un signal fort aux gouvernements nationaux lors de la COP 30, les négociations climatiques de l’ONU au Brésil. Alors que les contributions déterminées au niveau national (CDN) promises par les gouvernements mondiaux continuent d’être insuffisantes, les croyants du monde entier agissent à travers les contributions déterminées par les peuples (PDC).

Les dirigeants des groupes religieux se joignent aux appels de plus en plus nombreux en faveur de la fin de l’ère des combustibles fossiles, contrairement aux actions des grandes compagnies pétrolières et gazières. Ces dernières semaines, un tribunal parisien a jugé que le géant pétrolier français TotalEnergies avait trompé les consommateurs en se présentant comme un « acteur majeur de la transition énergétique », tout en continuant à produire davantage de combustibles fossiles. Total construit actuellement le vaste oléoduc d’Afrique de l’Est (EACOP) à travers l’Ouganda et la Tanzanie, ce qui aggraverait l’urgence climatique, mettrait en danger les communautés vulnérables et causerait des dommages importants aux écosystèmes. La société a également été critiquée pour sa décision de relancer le projet controversé de GNL au Mozambique, alors que les Pays-Bas ont ouvert une enquête sur un massacre perpétré dans une usine à gaz au Mozambique.

Un nouveau rapport d’Urgewald montre que l’industrie des combustibles fossiles prévoit une expansion à court terme supérieure de 33 % à celle de 2021, année où l’Agence internationale de l’énergie (AIE) a déclaré qu’aucun nouveau gisement de pétrole ou de gaz n’était nécessaire pour répondre à la demande dans un monde limité à 1,5 °C. Le rapport met en évidence les projets d’ExxonMobil, Chevron, CNPC et Petrobras visant à puiser du pétrole et du gaz dans une zone écologiquement sensible du fleuve Amazone, après que le gouvernement brésilien leur en a récemment accordé l’autorisation.

La liste complète des 62 institutions qui désinvestissent des énergies fossiles et les déclarations de leurs dirigeants sont disponibles ici.

Déclarations des dirigeants :

Frère Thomas Hollweck SJ, Provincial des Jésuites en Europe centrale : « Le changement climatique menace notre environnement et la vie sur notre planète. Les personnes les plus touchées sont les populations les plus pauvres des pays du Sud, qui contribuent le moins aux causes du changement climatique et ne disposent que de moyens limités pour se protéger. Lorsque nous, jésuites, nous engageons en faveur de la préservation de la création, nous sommes appelés, en Europe en particulier, à prendre nos responsabilités et à nous tenir aux côtés des populations des régions les plus touchées. Le désinvestissement de la production d’énergie fossile est une contribution concrète à cet effort. Nos investissements financiers, dont nous avons besoin pour l’éducation et la retraite des membres de l’ordre, par exemple, suivent déjà des directives éthiques. Nous allons désormais renforcer ces directives et désinvestir systématiquement de tous les investissements dans les énergies fossiles. Nous contribuons ainsi à un avenir digne d’être vécu, pour nous et pour les générations futures. »

Agnes Richard, Animatrice du Chapitre canadien du Mouvement Laudato Si’ Canada : « Le Mouvement Laudato Si’ Canada est très heureux d’accueillir l’archidiocèse de Gatineau, dans la province de Québec, au Canada, parmi ceux qui s’engagent à promouvoir une économie fondée sur les énergies propres. Alors que l’archidiocèse de Gatineau a complètement désinvesti ses actifs financiers des énergies fossiles il y a près de dix ans, il s’engage à maintenir cette voie à long terme. Nous devons rester vigilants et veiller à ce que le statu quo dans un secteur énergétique hautement polluant ne puisse plus perdurer et soit découragé à chaque occasion. »

Cardinal Augusto Paolo Lojudice, archevêque de Sienne-Colle di Val d’Elsa-Montalcino et évêque de Montepulciano-Chiusi-Pienza : « Notre engagement en faveur du désinvestissement n’est pas seulement une décision économique, mais aussi une décision morale : un témoignage que la foi doit éclairer tous les aspects de la vie, y compris la manière dont nous prenons soin de notre maison commune. La décarbonisation est un acte de justice, d’amour pour les pauvres et d’espérance pour les générations futures, comme nous l’a montré le pape François. Cet engagement exprime également notre solidarité avec ceux qui souffrent des conséquences des conflits souvent alimentés par la dépendance aux combustibles fossiles, un thème abordé à plusieurs reprises par le pape Léon XIV, qui a appelé à remédier au fait que “notre terre est en train de tomber en ruine”. »

Monseigneur Paolo Giulietti, archevêque de Lucques : « L’engagement de l’Église en faveur d’une conversion écologique sérieuse, visant à protéger la Terre et ses créatures, implique également des décisions communautaires spécifiques qui améliorent les pratiques institutionnelles et inspirent les décisions personnelles. L’abandon progressif des combustibles fossiles et l’utilisation d’énergies renouvelables en font partie : outre le projet de communauté énergétique, nous adhérons également à des processus d’investissement “sans énergie fossile”. J’espère que toute notre communauté diocésaine prendra des mesures en faveur de la durabilité qui expriment le respect de la création et l’amour du Créateur. »

Docteur Jörg Mayer, président de l’Arbeitskreis Kirchlicher Investoren (AKI) : « Les membres de l’AKI, qui comprend l’Église protestante en Allemagne et les Églises régionales, sont unis par la conviction qu’investir de l’argent ne signifie pas renoncer à ses responsabilités. Au contraire : en excluant les entreprises qui tirent plus de 5 % de leurs revenus de l’extraction du charbon ou de la production non conventionnelle de pétrole et de gaz, ils assument leur responsabilité devant Dieu et l’humanité quant à l’utilisation de leur argent. Le charbon, les sables bitumineux et les schistes bitumineux sont les combustibles fossiles qui ont la plus forte empreinte carbone et environnementale. À l’AKI, l’application de ces critères d’exclusion est complétée par d’autres instruments d’investissement éthique et durable, tels que la préférence accordée aux entreprises qui se sont engagées à respecter des objectifs climatiques fondés sur des données scientifiques. Nous utilisons également l’outil formatif de l’engagement, c’est-à-dire l’influence active des investisseurs sur les objets d’investissement dans le but d’améliorer la gestion climatique des entreprises. »

Heike Hardell, conseillère ecclésiale principale et directrice financière de l’Église évangélique luthérienne d’Allemagne du Nord (Nordkirche) : « En tant qu’Église évangélique luthérienne d’Allemagne du Nord, nous avons la responsabilité de veiller à ce que nos ressources financières soient utilisées conformément à notre mission, c’est-à-dire pour le bien-être de l’humanité et de la création. C’est pourquoi nous avons établi des critères d’exclusion clairs pour les investissements dans les combustibles fossiles dans nos directives d’investissement. En participant à l’annonce conjointe de désinvestissement, nous réaffirmons publiquement ce que nous avons déjà inscrit dans nos pratiques financières : nous n’investissons pas dans la destruction de la création, mais dans sa préservation. En tant qu’Église, nous voulons également envoyer un signal : pour une économie qui favorise la vie, pour une justice climatique qui ne connaît pas de frontières. Nos actions sont fondées sur la conviction que Dieu nous a confié cette Terre et que nous devons la façonner avec responsabilité et respect. »

Lorna Gold, directrice exécutive du Mouvement Laudato Si’ : « Nous nous réjouissons de l’annonce faite aujourd’hui selon laquelle 62 institutions religieuses ont rejoint le mouvement mondial de désinvestissement. Le désinvestissement des énergies fossiles est un impératif moral face à la crise climatique croissante et nous exhortons toutes les institutions catholiques à rejoindre le mouvement. Alors que les gouvernements du monde entier continuent de manquer à leurs obligations en matière d’action climatique, il est extrêmement encourageant de voir les groupes confessionnels prendre l’initiative en désinvestissant des entreprises du secteur des énergies fossiles et en augmentant leurs investissements dans les solutions climatiques. »

Révérend professeur Jerry Pillay, secrétaire général du Conseil œcuménique des Églises :  « Dans ce Kairos que nous traversons aujourd’hui, les croyants doivent veiller tout particulièrement à ne pas se rendre complices, inconsciemment ou par inadvertance, des causes profondes qui alimentent l’urgence climatique. Vérifier auprès de nos prestataires de services financiers que les actifs de l’Église ne sont pas utilisés pour financer l’expansion des énergies fossiles est un impératif moral envers les enfants et les générations futures. Nous encourageons donc toutes les personnes de bonne volonté à utiliser les outils disponibles et à vérifier que leurs banques, leurs fonds de pension et leurs assurances ne nuisent pas en soutenant ce qui est responsable de 90 % des émissions de CO2 actuelles, à savoir les énergies fossiles. Ensemble, accélérons la transition vers les énergies renouvelables grâce à des choix financiers responsables. »

Georg Sauerwein, Christians for Future, qui a coordonné l’annonce en Allemagne : « Presque toutes les grandes institutions protestantes en Allemagne, mais aussi des institutions catholiques, comme les jésuites, se sont jointes à cette annonce de désinvestissement. Christians for Future y voit un signe important : contrairement au recul actuel des politiques climatiques dans le domaine politique, les piliers chrétiens importants de notre société restent engagés sur la voie de la justice climatique. »

Révérende Rachel Mash, coordinatrice de Green Anglicans : « Face à tant de mauvaises nouvelles, nous saluons l’engagement de 62 institutions religieuses en faveur du désinvestissement. La climatologue chrétienne docteur Katharine Hayhoe nous rappelle que le rocher géant de l’action climatique ne se trouve pas au pied d’une colline incroyablement escarpée, que seules quelques mains tentent de pousser vers le haut, mais qu’il est déjà au sommet et dévale la pente, poussé par des millions de mains dans la bonne direction. Cela nous donne de l’espérance. Il ne roule pas encore assez vite, mais chaque nouvelle main qui se joint à l’effort le fera rouler un peu plus vite : “Chaque action compte… Chaque choix compte.” L’investissement est une action importante que les communautés religieuses peuvent entreprendre. »

Lignes directrices pour un investissement éthique et durable dans l’Église protestante allemande, p. 64 :

« Une stratégie d’investissement sensible au climat pour les investisseurs religieux suit les valeurs chrétiennes dans une approche axée sur l’impact. Dans une telle stratégie, les investissements doivent être réalisés de manière socialement responsable, conformément aux normes sociales, ainsi qu’à la justice écologique et intergénérationnelle, en tenant compte de nos valeurs chrétiennes. Il est donc particulièrement important de mettre fin à la crise climatique, car tous les objectifs éthiques durables sont également concernés : il ne s’agit pas seulement du respect et de la conservation de toute vie non humaine, mais aussi de la responsabilité envers les personnes qui souffrent le plus du changement climatique, même si elles y contribuent le moins, ainsi que de la responsabilité envers les générations futures. »

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À propos du Mouvement Laudato Si’ : Le Mouvement Laudato Si’ est un mouvement mondial regroupant des leaders locaux et des organisations membres, qui mobilise et inspire la communauté catholique afin de parvenir à la justice climatique et écologique. (laudatosimovement.org)

À propos du Conseil œcuménique des Églises : Le Conseil œcuménique des Églises est une communauté de 356 Églises issues de plus de 120 pays, représentant plus de 600 millions de chrétiens à travers le monde. Il comprend la plupart des Églises orthodoxes du monde, de nombreuses Églises anglicanes, baptistes, luthériennes, méthodistes et réformées, ainsi que de nombreuses Églises unies et indépendantes. Consultez sa ressource Sauver la vie des enfants sur la banque responsable : https://oikoumene.org/fr/resources/publications/save-childrens-lives 

À propos des Green Anglicans : Green Anglicans est un mouvement lancé par l’Église anglicane d’Afrique australe qui vise à responsabiliser, encourager et tenir l’Église responsable de la protection de la Terre sur laquelle Dieu nous a gracieusement placés. (greenanglicans.org)

À propos de GreenFaith : GreenFaith est une organisation internationale, interreligieuse et citoyenne qui milite pour la justice climatique et emploie du personnel dans 12 pays d’Afrique, d’Asie, d’Europe et des Amériques. GreenFaith mène des campagnes pour mettre fin au développement des énergies fossiles, promouvoir le développement des énergies renouvelables de manière éthique et faire pression sur les pollueurs historiques du climat (gouvernements et entreprises) afin qu’ils paient pour les dommages qu’ils ont causés. (greenfaith.org)

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